Communiqué de presse – pour diffusion immédiate
15 septembre 2018
France – Les résultats de 20 ans de négociations sur le climat menées par des gouvernements, ou en dix ans de promesses de régulation de la finance ou de lutte contre l’évasion fiscale, ne sont pas à la hauteur des enjeux.
Afin de marquer la date anniversaire des 10 ans de la chute de la banque d’affaire Lehman Brothers, symbole du début de la crise financière, une journée d’action est organisée par la coalition européenne #10YearsOn, qui regroupe plus de 60 organisations appellant à prendre le contrôle sur la finance et notre avenir. L’appel lancé en France rassemble une coalition large d’organisations telles que 350.org, Alternatiba, Les amis de la terre, Attac, le collectif pour une Transition citoyenne, le CRID, Energie partagée, Ingénieurs sans frontières, la Nef, Notre affaire à tous, Sciences citoyennes, le Secours Catholique, Union syndicale Solidaires, ou encore le mouvement Utopia.
Ces organisations signent ensemble un appel qui indique : “Les élites de la finance ont utilisé la crise pour instaurer des politiques d’austérité aux conséquences sociales dramatiques : chômage, manque de logements, de santé, désagrégation des services publics. Des sommes colossales continuent d’alimenter des projets toxiques au lieu d’être mises à profit pour financer une transition socialement juste vers une économie faible en carbone.” Des actions ciblent aujourd’hui en France les plus grandes banques privées qui continuent à investir massivement dans les énergies du passé, à financer des industries toxiques et à organiser l’évasion fiscale,
La principale institution financière française, la Caisse des Dépôts et Consignations est également pointée du doigt : Clémence Dubois, porte-parole pour 350.org en France commente « Nous attendons du gouvernement français une mesure simple, pour commencer. Elle aurait l’énorme avantage de ne rien coûter, mais permettrait au contraire de dégager des fonds pour soutenir les investissements au service de la transition : désinvestir des combustibles fossiles. Pour l’heure, nous marchons sur la tête : l’argent public, à travers la Caisse des dépôts et Consignations, continue d’être investi à coups de millions d’euros dans le charbon, le gaz et le pétrole« .
Ces flux financiers destructeurs liés à l’argent public français s’illustrent particulièrement cette semaine : le Fonds de réserve pour les retraites détient ainsi 11,86 millions d’euros en obligations dans RWE. L’entreprise s’attaque depuis quelques jours au déboisement de la forêt de Hambach située dans l’ouest de l’Allemagne pour y agrandir la plus grande mine à ciel ouvert du pays. “Non contente d’avoir englouti 90% de cette forêt millénaire ainsi que les villages avoisinants au cours des dernières décennies, RWE poursuit sa logique destructrice avec le soutien de l’argent public.” commente le collectif Ende Gelande Paris
crédit : Denis Meyer
Un constat inquiétant qui s’observe également sur la scène internationale : une nouvelle étude d’Oil Change International montre ainsi que si les gouvernements occidentaux tournent le dos aux combustibles fossiles chez eux, ils continuent à diriger 60% de l’aide publique au développement vers des projets de production ou de transport de combustibles fossiles, en Afrique notamment, contre seulement 18% pour les énergies renouvelables.
En décembre 2017, en amont du sommet international Finance – Climat convoqué par Emmanuel Macron, plus de 80 économistes de réputation mondiale, venant de 20 pays différents, alertaient nos décideurs en publiant une déclaration réclamant l’arrêt total des flux financiers vers la production et les infrastructures fossiles et une augmentation massive des investissements dans les énergies renouvelables. Ils indiquaient ainsi : “Les investisseurs mondiaux et les acteurs et institutions internationales de développement doivent reconnaître que la poursuite des investissements dans la production de combustibles fossiles est inconciliable avec une action climatique significative.”
La poursuite des investissements dans les combustibles fossiles ne nuit pas seulement à l’environnement : elle menace également notre économie. En 2017 l’Agence Internationale de l’Energie a estimé que la mise en œuvre de nouvelles politiques climatiques et l’orientation massive vers les énergies renouvelables pourraient conduire à la surévaluation de 1000 milliards $ d’actifs pétroliers et de 300 milliards $ d’actifs gaziers au total.
Ces « actifs bloqués », parmi d’autres risques financiers liés au changement climatique sont l’une des raisons qui ont poussé déjà plus de 1000 investisseurs clairvoyants à se débarrasser de leurs actifs charbonniers, pétroliers et gaziers. Le mouvement de désinvestissement des combustibles fossiles, qui se limitait initialement à une poignée de campus universitaires, comprend aujourd’hui des fonds de placement gérant plus de 6240 milliards $ d’actifs, comme le révélait ce lundi un nouveau rapport, compilé par Arabella Advisors, mettant en évidence la croissance et l’ampleur remarquables du mouvement.
«Le désinvestissement des combustibles fossiles est devenu un phénomène mondial», selon la directrice exécutive de 350.org, May Boeve. «L’année 2018 a été une année décisive pour le mouvement, avec de nouveaux engagements de désinvestissement de la part de New York ou Londres, de tout l’Etat irlandais et de centaines d’autres institutions emblématiques. Alors que nous assistons aux conséquences dévastatrices des dérèglements climatiques dans le monde entier, le public est en train de s’éloigner rapidement des combustibles fossiles et il est temps que les politiciens suivent. »
Les grandes compagnies pétrolières ont cité cette année le désinvestissement comme un risque important pour leurs activités. Selon le dernier rapport annuel de Shell: «Il pourrait avoir un effet défavorable significatif sur la valeur de [leurs] actions et [leur] capacité à accéder aux marchés des capitaux propres».
Samedi dernier, le 8 septembre 2018, la mobilisation internationale “Dans nos rues pour le climat” a compté plus de 140 000 personnes dans les rues de France en amont du “Global Climate Action Summit” de San Francisco, pour transmettre un message simple aux élus et aux institutions financières : assez de tergiversations, assez de retards. “Pas un Euro de Plus” pour l’industrie fossile, réinvestissons dans un modèle énergétique sobre, décentralisé et juste, 100% renouvelable.